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Décret sur le reporting de durabilité

02/07/2021
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L'article 29 de la loi énergie-climat a succédé à l'article 173-VI de la LTECV il y a deux ans. Son décret d’application voté le mois dernier va mettre en œuvre cet article, qui prévoit des nouvelles normes de reporting sur les critères ESG, sur le climat, la biodiversité et sur la gestion des risques associés à ces domaines. Les gestionnaires d’actifs seront dorénavant tenus de publier leur stratégie d’alignement sur les objectifs de l’accord de Paris et sur ceux liés à la biodiversité. Ils devront aussi fournir une estimation quantitative de l’impact financier des principaux risques ESG identifiés et un plan d’action visant à réduire leur exposition à ces risques.

 

Quelle part des encours intègre des critères ESG ?

L’article 1er du décret modifie l’article D. 533-16-1 du code monétaire et financier, et demande aux activités de gestion de portefeuille pour compte de tiers de publier des informations en matière de durabilité. Elles devront procéder à une distinction par classes d’actifs (et en décrivant la façon dont cette distinction a été opérée), tout en précisant pour chaque information la part du pourcentage et le montant en euros des encours ou du bilan. Le périmètre des entités et produits financiers auxquels la prise en compte des critères ESG s’applique et, lorsqu’un échéancier est fixé, la date d’entrée en vigueur des engagements devront aussi être communiqués.

Le reporting sur les critères ESG intègrera :

  • Les informations relatives à la démarche générale de l’entité :

- Présentation résumée de la démarche générale sur la prise en compte de critères ESG

- Contenu, fréquence et moyens utilisés par l’entité pour informer ses parties prenantes sur les critères relatifs aux objectifs ESG pris en compte dans la politique et la stratégie d’investissement

- Liste des produits financiers mentionnés en vertu des articles 8 et 9 du règlement SFDR, et la part globale (en pourcentage) des encours sous gestion prenant en compte des critères ESG dans le montant total des encours gérés par l’entité

- Prise en compte des critères ESG dans le processus de prise de décision, ainsi que l’adhésion de l’entité ou de certains produits financiers à une charte, un code, une initiative ou l’obtention d’un label sur des critères ESG

  • Les informations relatives aux moyens internes déployés par l’entité :

- Description des ressources financières, humaines et techniques dédiées à la prise en compte des critères ESG dans la stratégie d’investissement en les rapportant aux encours totaux gérés ou détenus par l’entité

- Actions menées en vue d’un renforcement des capacités internes de l’entité

- Informations relatives à la démarche de prise en compte des critères ESG au niveau de la gouvernance de l’entité (dont la politique de rémunération)

- Informations sur la stratégie d’engagement auprès des émetteurs ou vis-à-vis des sociétés de gestion ainsi que sur sa mise en œuvre

- Informations relatives à la taxonomie européenne et aux combustibles fossiles

- Informations sur la stratégie d’alignement avec les objectifs internationaux de limitation du réchauffement climatique prévus par l’accord de Paris

- Informations sur la stratégie d’alignement avec les objectifs de long terme liés à la biodiversité ;

- Informations sur les démarches de prise en compte des critères ESG dans la gestion des risques.

 

Reporting sur le climat

Les entités devront publier leur stratégie d’alignement avec les objectifs de long terme de l’accord de Paris relatifs à l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre. Elles devront aussi, le cas échéant, publier leur stratégie bas-carbone pour les produits financiers dont les investissements sous-jacents sont entièrement réalisés sur le territoire français.

Ces publications relatives au climat devront notamment comprendre :

  • Un objectif quantitatif à horizon 2030, revu tous les 5 ans jusqu’à horizon 2050. Cet objectif comprend les émissions de GES directes et indirectes en valeur absolue ou en valeur d’intensité par rapport à un scénario de référence et une année de référence.
  • Une quantification des résultats à l’aide d’au moins un indicateur
  • Les changements intervenus au sein de la stratégie d’investissements en lien avec la stratégie d’alignement sur l’accord de Paris. Les politiques de sortie progressive du charbon et des hydrocarbures non-conventionnels sont notamment requises. Il faudra communiquer le calendrier de sortie et la part des encours totaux gérés ou détenus.

 

Reporting sur la biodiversité

Grande nouveauté : les gestionnaires d’actifs devront publier leurs stratégies d’alignements sur les objectifs de long terme liés à la biodiversité. Ces gestionnaires devront préciser le périmètre de la chaine de valeur qui comprend les objectifs fixés horizon 2030, puis tous les 5 ans, sur les éléments suivants :

  • Une mesure du respect des objectifs figurant dans la convention sur la diversité biologique (adoptée en 1992)
  • Une analyse de la contribution à la réduction des principales pressions et impacts sur la biodiversité (défini par l’IPBES, GIEC de la biodiversité)
  • La mention de l’appui sur un indicateur d’empreinte biodiversité et la manière dont cet indicateur permet de mesurer le respect des objectifs internationaux liés à la biodiversité

 

Reporting sur la gestion des risques

Les obligés devront publier des informations sur la prise en compte des critères ESG dans la gestion des risques (physiques, de transition et de responsabilité) liés au changement climatique et à la biodiversité.

Ce reporting inclura en particulier :

  • Le process d’identification, d’évaluation, de priorisation et de gestion des risques liés à la prise en compte des critères ESG, ainsi que la manière dont ce processus répond aux recommandations des autorités européennes de surveillance financière
  • Description des principaux risques en matière ESG pris en compte et analysés, avec une caractérisation de ces risques (caractère actuel ou émergent, exogène ou endogène à l’entité, leur occurrence, leur intensité, et l’horizon de temps qui les caractérise, etc.), leur segmentation (risques physiques, de transition, de contentieux ou de responsabilité liés aux facteurs environnementaux), une indication des secteurs économiques et des zones géographiques concernés par ces risques, du caractère (récurrent ou ponctuel) des risques retenus, et enfin une explicitation des critères utilisés pour sélectionner les risques importants et leur pondération.
  • Un plan d’action visant à réduire l’exposition de l’entité aux principaux risques ESG pris en compte
  • Une estimation quantitative de l’impact financier des principaux risques en matière ESG identifiés et de la proportion des actifs exposés, ainsi que l’horizon de temps associé à ces impacts, comprenant notamment l’impact sur la valorisation du portefeuille. Dans le cas d’une déclaration qualitative, l’entité décrit les difficultés rencontrées et les mesures envisagées pour apprécier quantitativement l’impact financier de ces risques.

Plan d’amélioration

Seuls les gestionnaires d’actifs ayant plus de 500M€ de bilan ou d’encours devront publier toutes les informations suivantes. Le décret  prévoit aussi la possibilité de publier les informations au niveau de l’ensemble ou d’une partie d’un groupe.

Le décret donne la possibilité de ne pas publier certaines informations demandées. Elles devront cependant présenter un plan d’amélioration comprenant une identification des opportunités d’amélioration de la stratégie actuelle et des actions concrètes permettant l’amélioration de la situation actuelle. Des informations sur les changements stratégiques et opérationnels introduits (ou à introduire) à la suite de la mise en place des actions correctives seront aussi à communiquer avec les objectifs et calendrier des mesures.

 

Transmission du rapport à l’Ademe

Les informations seront présentées dans les 6 mois suivant la clôture de l’exercice dans un rapport annuel au format standardisé obligatoire (article 4 du règlement SFDR). Elles devront aussi être publiées sur une page du site internet du gestionnaire et transmises aux autorités compétentes, ainsi qu’à l’Ademe, qui pourra en exploiter les données à des fins d’études statistiques sur la Plateforme de la transparence climatique.

Le décret prévoit des dispositions transitoires.

Le gouvernement prévoit qu’un « bilan de l’application des dispositions » du présent décret sera réalisé par le gouvernement à l’issu des deux premiers exercices (avant Décembre 2023), puis tous les 3 ans. Ces « bilans » s’appuieront sur les travaux de l’Autorité des marchés financiers et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.