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Le prix du carbone en France est bien sur la trajectoire recommandée par la commission Quinet

Jean Baptiste Cottenceau
07/02/2019
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Le gouvernement français annonce l’augmentation de la taxe carbone

Le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire a annoncé mercredi 12 juillet 2017 que la composante carbone de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) augmenterait de façon plus ambitieuse que la trajectoire fixée par la loi de transition énergétique et serait portée à 86 euros d’ici la fin du quinquennat, soit 2022.

Le prix du carbone, un outil économique de régulation énergétique : oui, mais à quel tarif ?

Complémentaire de la réglementation, de l’investissement public et de plus en plus privé pour favoriser la diffusion de techniques alternatives n’émettant pas de polluants, l’incitation par les prix est un levier majeur de la transition énergétique. Plus la valeur tutélaire du carbone est élevée, plus les projet, parce que jugés rentables, auront une faible empreinte carbone.

Il y a 3 ans, la Banque mondiale recensait déjà 40 pays, couvrant 12% des émissions mondiales, ayant instauré une taxe carbone. Mais l’éventail des prix du carbone observés de par le monde va de quelques euros au Mexique à plus de 100 euros la tonne en Suède.

Il s’agit donc de déterminer « le juste prix du carbone ». C’est la raison pour laquelle, en 2008, la commission Quinet, composée de représentants des partenaires économiques et sociaux et des organisations environnementales, a été chargée de proposer une valeur du carbone pour l’évaluation des choix d’investissements publics et, plus généralement, pour l’évaluation environnementale des politiques publiques. Le rapport Quinet, publié en 2009, fait office de référence car il prend en compte d’une part les dernières connaissances scientifiques sur l’évolution à long terme de la concentration des gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère et d’autre part les derniers engagements auxquels la France s’est soumise. Les conclusions de la commission Quinet pointent la nécessité de l’augmentation continue de la valeur tutélaire du carbone comme le montre le graphique ci-dessous.

prix du carbone

Ainsi, avec les déclarations de juillet 2017, la France positionne le prix du carbone sur la trajectoire proposée par la commission Quinet : la valeur du CO2, fixée à 100 euros la tonne à l’horizon 2030, croitrait après 2030 au rythme du taux d’actualisation public de 4%. Cette règle garantirait que le prix actualisé d’une ressource limitée reste constant au cours du temps et ne soit pas écrasé par l’actualisation. Avec ces hypothèses, la valeur du carbone retenue croîtrait de 100 euros la tonne de CO2 en 2030 à 200 euros la tonne de CO2 en 2050.

L’alignement de la taxe sur la valeur tutélaire du carbone et la convergence de la fiscalité de l’essence et du diesel sont une première intégration du juste prix du carbone à la fiscalité énergétique existante. C’est un premier pas vers la réalisation des objectifs français et européen à moyen et long terme de réduction des gaz à effet de serre. Sur le long terme (horizon 2050), la France s’est engagée en 2015 dans la loi transition énergétique pour la croissance verte à réduire ses émissions de GES de 75 % par rapport à ses niveaux actuels. À moyen terme (horizon 2020), l’Union européenne s’est donnée pour objectif en 2007 de réduire de 20 % ses émissions de GES par rapport à 1990. Le niveau relativement élevé de la tarification carbone reflète essentiellement le caractère ambitieux des objectifs français, européens et internationaux et la difficulté de réussir le déploiement des technologies peu émettrices sur un horizon aussi court.

L’annonce de la hausse du prix du carbone s’aligne enfin avec la trajectoire collective de réduction des émissions de gaz à effet de serre, guidée par l’objectif global de limitation du réchauffement climatique à 2°C.

La phase de transition dans laquelle nous sommes se confirme bien : réduire ses émissions revient à faire du bien à la planète et à son portefeuille !

 


 

Pour en savoir plus sur les outils économiques de la transition énergétique : la différence entre la valeur de marché du carbone et la valeur tutélaire du carbone.

Les deux types d’incitation par les prix pour la transition énergétique sont la taxe et les quotas.

  • Les taxes permettent de désinciter les personnes morales à émettre des GES et de subventionner les sources d’énergie qui sont renouvelables et n’entraînent pas de rejet de carbone. On parle de valeur « tutélaire » du carbone pour désigner le prix de la tonne du carbone (et par suite de la tonne de CO2) fixé par l’État, au regard notamment de ses engagements dans la lutte contre le réchauffement climatique. Cette valeur est le fruit d’un compromis raisonné entre de multiples acteurs (partenaires économiques et sociaux, organisations environnementales, universitaires, etc.). Une valeur tutélaire du carbone constitue fondamentalement un instrument de mesure permettant d’introduire dans les débats et les décisions un minimum de cohérence, tant au plan international que national. Ce référentiel carbone peut à la fois orienter l’action publique et constituer un élément d’information pour les agents économiques privés en leur donnant de la visibilité sur les orientations publiques de moyen-long terme.

  • La valeur tutélaire du carbone s’oppose à la valeur « de marché » du carbone, qui résulte directement de la confrontation de l’offre et de la demande sur le marché des permis d’émissions de gaz carbonique. Les quotas, définition d’un droit de propriété d’une émission GES à partir d’un montant fini des émissions, permettent de réguler les émissions de GES en se fixant un objectif global initial. La valeur de marché du carbone tourne actuellement autour de 5 € par tonne de CO2 en Europe (marché ETS). Ce prix fut longtemps tiré par le bas par la crise économique, et l’est artificiellement par les particularités du marché européen. De plus, il ne s’applique qu’à une partie des émissions (environ 40 %), celles qui sont soumises au système d’échange de permis, ce qui exclut l’agriculture, l’habitat et les transports. Dans ce contexte, il est justifié que la puissance publique définisse un autre prix pour les secteurs qui ne sont pas concernés par le marché carbone européen.